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Pourquoi vous parler de la fermeture du compte Facebook d’un proche suite à son décès ?

Cette année, le 30 mai, comme chaque année depuis 9 ans, Facebook m’a rappelé de souhaiter un bon anniversaire à Alex.

Alex, c’était le gars cool, qui venait en soirée avec des lunettes de soleil orange fluo, qui portait des T-shirts tous plus improbables les uns que les autres. C’est le mec gentil et drôle qui parlait à tout le monde et faisait tout pour que chacun s’amuse et trouve sa place. C’est celui qui venait de finir son école de cuisine et qui serait probablement devenu un super chef. Même si quand il nous invitait chez lui, il préférait nous servir des pâtes carbonara. C’est aussi celui qui est tombé gravement malade à l’âge de 22 ans et que nous avons perdu en 6 mois de temps.

Je n’étais pas son meilleur ami du village d’à côté. Je n’étais pas un de ses 3 frères à qui il manque chaque jour. Je ne suis pas ses parents qui se demandent encore pourquoi cette injustice a frappé leur famille.

Chaque année depuis 9 ans, il m’arrive de penser à Alex. Je ne vis pas à côté du cimetière où il repose, et je ne me suis rendue sur sa tombe qu’une fois. Et pourtant aujourd’hui c’est à lui que je pense en écrivant cet article sur Facebook. Il est la raison pour laquelle je me pose cette question « Pourquoi n’a-t-on pas supprimé son compte près son décès ? »

Que doit-on penser de cette trace digitale qui reste de notre ami disparu ?

Aurait-on dû demander à Facebook de supprimer le compte, quand cela était encore possible, ou de transformer celui-ci en page de commémoration ?

Au cours de cet article, vous allez peut-être avoir le sentiment que je vais dire des choses, puis leur contraire. Et pour cause, j’ai rencontré des personnes avec des avis différents sur la question. L’objectif n’est pas de donner une réponse unique et universelle à cette question mais de vous aider à vous faire vous-même un avis à travers 4 questions :

1. Est-ce pour vous un acte administratif comme un autre ?

La question du compte Facebook n’est pas la première qu’on se pose lors du décès d’un proche. Informer les personnes qui l’ont côtoyé, préparer les obsèques, répondre aux sollicitations de l’entourage, s’occuper des premières démarches administratives… Telles sont les choses concrètes qui sont traitées en premier lieu.

La volonté de fermer le compte Facebook de son proche disparu semblerait être la première réaction la plus répandue. Puisqu’il est décédé, il semble logique que ce compte soit fermé : son compte bancaire sera clos, son numéro de téléphone sera supprimé alors pourquoi n’en irait-il pas de même pour cet outil qu’est Facebook ?

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Parce que Facebook n’est pas un service administratif, c’est un réseau social. Il conserve l’ensemble des photos, messages, publications qui ont été partagées. Il crée un lien social entre des personnes et non un lien marchant. D’ailleurs, vous continuerez de payer la facture de téléphone si vous ne coupez pas la ligne. Vous ne payerez rien si vous maintenez le compte du réseau social actif.

2. Supprimer le compte Facebook de votre proche disparu vous aiderait-il à mieux vivre le deuil ?

« Fermer ce compte m’aiderait à passer à autre chose » m’a confié Guillaume, qui a perdu son meilleur ami. Pour certaines personnes, couper tout lien, jeter les choses matérielles qui font penser à l’être disparu est un moyen de commencer une nouvelle vie. Les souvenirs eux restent en mémoire, Facebook ou pas Facebook.

Avec Facebook, on fige une image du défunt et on renforce les souvenirs.

« Je me souviens d’autant plus de ce moment passé avec Alex qu’il en existe une trace (photos, commentaires) facilement accessible. ».

Sandra

Pour d’autres au contraire, ces espaces numériques risquent d’altérer le souvenir de la personne : « De toute façon, ses photos sur Facebook ne correspondent pas à qui Michaël était dans la vraie vie. Il n’y a que des photos de lui et ses amis de fac en soirée. Où est son enfance ? Où sont les bons moments passés en famille ? Où sont les médailles de ses compétitions de judo ? » raconte Martine, qui a perdu son fils.

Bonne nouvelle : ce n’est pas le seul canal de remémoration des moments passés avec la personne disparue ! Des objets, des lieux, des photos imprimées jouent encore ce rôle.

3. Est- ce le moyen de récupérer des données cédées à l’entreprise américaine ?

Lorsque quelqu’un s’inscrit sur Facebook, tout ce qui s’y passe est cédé à l’entreprise américaine. Et cela, on en prend plus en plus conscience, non pas à vie, mais au-delà de la vie. Nos commentaires, nos « j’aime », nos photos restent. La taille de notre potentielle empreinte numérique augmente en même temps que notre conscience de celle-ci. La crainte vis-à-vis des GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple) est de plus en plus partagée. Néanmoins se couper de leur usage parait pour beaucoup insurmontable.

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Fermer le compte d’un ami Facebook ne signifie pas la destruction de l’ensemble des données. Les photos publiées par la personne sur son propre profil sont supprimées sous 90 jours. Pour ce qui est des messages envoyés ou des photos partagés avec d’autres amis, elles restent accessibles.

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Source : Facebook

Notez dans tous les cas que cette suppression de compte est complexe. Pour vous y aider, Une Rose Blanche a réalisé un tutoriel. Il y détaille pas à pas les étapes à suivre et les pièces à fournir.

4. Vous sentez-vous légitime pour décider de fermer le compte Facebook votre proche ?

Pour certains, Facebook est un moyen de garder un lien avec le défunt. Le profil de votre proche peut en aider à mieux vivre le deuil. La fermeture du profil Facebook d’une personne disparue pourrait alors représenter comme une deuxième mort pour eux.

Les héritiers sont souvent les plus légitimes pour réaliser ce type de démarches suite à un décès. Pour autant, sont-ils également légitimes pour choisir de « priver » l’entourage, plus ou moins lointain, de ce contact virtuel avec le défunt ?

Ceux qui se posent la question du compte Facebook en premier ne sont pas nécessairement les plus légitimes administrativement pour enclencher les démarches. Si en tant qu’ami, vous ne vous sentez pas légitime pour initier la démarche, pensez à en parler avec la famille (parent, conjoint, enfant…). Ce sont eux qui pourront prendre in fine la décision de lancer ou non la demande de suppression de compte. Peut-être savent-ils d’ailleurs ce que leur proche décédé aurait souhaité.

En synthèse, est-on pour ou contre la fermeture du compte ?

Vous l’aurez compris en me lisant, je n’ai pas de réponse tranchée sur ce sujet. Entre 2015 et 2018, l’Agence Nationale de Recherche ENEID a mené une grande enquête sous la Direction de Fanny GeorgesMaître de conférences à l’Université Sorbonne Nouvelle Paris 3. Peut-être celle-ci nous donnera-t-elle de nouvelles pistes pour anticiper le sujet.

La thématique est et sera probablement de plus en plus présente dans l’actualité : on annonce en effet pour 2098 plus de morts que de vivants sur Facebook, si le réseau existe toujours d’ici là !

 

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Facebook : évolution utilisateurs morts/en vie – Analyse : Hachem Saddiki

La proposition d’Une Rose Blanche

Rassembler. Se souvenir. Partager. Transmettre. 

Pour conserver les bons souvenirs partagés avec votre proche, Une Rose Blanche permettre de recueillir dans un livre lui rendant hommage (qu’ils aient été partagés sur Facebook ou non).

Photo de l’article : Niklas Hamann

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